Nouvelle année... [Libre]

Un autre sourire est venu se poser sur mes lèvres.

Tu sais, ça fait peut-être un bout de temps que je suis là mais j'ai encore deux trois contacts à l'extérieur sur lesquels je peux compter question médocs!

Je lui ai glissé un clin d'oeil et un coup d'épaule. Bien sûr, ce n'est pas demain la veille qu'on va s'enfuir, mais bon, on a le droit de rêvasser un peu!

Et puis casser des nez, c'est pas mal! Pour se faire respecter!

M'ouais c'est sûr... Mais les casser parce qu'on t'a frôler et que t'as décidé que c'était pas le moment... Je sais pas pourquoi, mais on m'a dit que c'était se foutre en rogne pour rien!

Ma clope étant fini, je l'écrasse dans le fond du cendrier alors qu'un surveillant vient vers nous.

-Baker, la cigarette t'est interdite il me semble.
C'est toujours ce qui est interdit qui est le meilleur.

Je glisse un grand sourire moqueur, mais il reste toujours là et ça m'énerve.

Qu'est-ce que tu veux?
-Le directeur t'attends.

Là il part pour de vrai et je soupire. Qu'est-ce qu'il me veut encore ce type!

Je souris alors qu'il écrase sa clope et qu'un des surveillants vient le réprimander. Mon sourire s'est élargi alors que le Nono avançait le fait que tout ce qui était bon était interdit. Le pire c'est que c'est vrai. Le surveillant n'est pas porté à la plaisanterie et lui fait savoir que le directeur l'attend. Mon sourire s'évanouit en un instant. Je me suis sentie obligée de poser cette question à Noah même si il était peu probable qu'il en connaisse la raison.

Qu'est-ce qu'il te veut?

Je saurai quand j'y serais, comme d'hab.

Je me lève du canapé, remonte un peu mon jeans, ajuste mon bonnet sur ma tête, puis je ramène les yeux sur Jesse.

Je te retrouve après pour le conte rendu.

Je lui glisse un clin d'oeil et m'éloigne vers les bureaux en fourrant mes mains dans mes poches.

Sa réponse ne m'étonne pas. On sait rarement d'avance pourquoi on doit aller chez le directeur, sauf quand on a fait une connerie. Noah s'est levé en ajustant ses vêtements et m'a regardée. Son regard m'a légèrement rassuré. Ca fait du bien d'avoir un an ami en fin de compte! J'hoche la tête comme réponse à ses paroles et m'allume une nouvelle cigarette... pas envie de bouger, certainement pas pour voir la tête de mes futures colocs d'ailleurs!

J'arrive dans le hall d'accueil du bâtiment principal, et je sens déjà que je vais détester cet endroit.

Ma famille est venue m'accompagner, sans doute pour se déculpabiliser de m'enfermer ici pour les prochains mois. Papa est nerveux et fuis mon regard, prétextant n'importe quelle chose à faire, formulaire à remplir, information à chercher, ou je ne sais quel autre médecin à contacter. Il s'en veut d'en être arrivé là, c'est évident. Maman, à l'inverse, n'a de cesse de me regarder avec son éternel air de chien battu. Un air qu'elle n'a plus jamais quitté depuis le jour où je lui ai avoué pourquoi j'allais si mal depuis quelques mois. Non, vraiment, je crois que je ne regretterais pas de m'éloigner d'eux les prochains temps.
La seule qui va réellement me manquer, c'est Sayuri. Elle, n'a jamais cessé de me voir comme je suis, ne m'a jamais aimé différemment. Sans doute parce que lorsque ma mère lui a expliqué, elle était trop jeune pour comprendre, peut être aussi parce qu'elle est la personne la plus adorable au monde. Je la regarde et je la sens prête à craquer d'un instant à l'autre. Pourvu qu'elle tienne, s'il elle pleure maintenant, je sens que je ne pourrai pas résister moi non plus. C'est déjà assez dur comme ça...

Mon père a soudain réapparu, quelqu'un a pris en charge mes affaires, et en moins de temps qu'il ne s'en est fallu pour le dire, tout comme on retire un pansement, mon père m'a serré dans ses bras et a disparu vers le parking. Ma mère, elle, a pleuré et m'a répété au moins cent fois combien elle m'aimait. Sayuri, dieu merci, a tenu bon et n'a pas versé une larme. Je ne doute pas qu'elle ait attendu d'être dans la voiture pour le faire. Je l'ai serrée fort dans mes bras, et j'ai pu sentir son petit coeur battre contre ma poitrine. Puis je l'ai regardé partir, les poings serrés.

A présent je suis là, comme une imbécile, debout dans le hall d'entrée et à deux doigts de craquer. Craquer après à peine 20 minutes de présence ici, ça fait mauvais genre... Il me faut m'asseoir, vite.
J'apperçois un coin avec des fauteuils et je me précipite sur le premier venu, braquant mon regard au sol, tâchant de reprendre une respiration normale, sans même remarquer la jolie brune à la cigarette assise à côté de moi.

Je continuais de fumer tranquillement lorsque j'ai aperçu une famille faire ses adieux à une jeune fille. J'ai dégluti. Pitoyable comme scène... La fille est ensuite venue s'asseoir à côté de moi sans même me remarquer, probablement trop chamboulée pour voir quoi que ce soit d'autre que sa tristesse. Encore une nouvelle... C'est mon jour de bonté, non? Ouais menfin... faut peut-être pas pousser. Je ne suis pas le comité d'accueil non plus!

La crise d'angoisse à peu près estompée, je redresse le museau et pose alors un premier regard autour de moi. Le hall est vaste et donne sur une sorte de petit jardin interieur. Autour de moi, d'autres familles se séparent, non sans moins de larmes que ma mère.
Alors c'est ici que je vais devoir survivre les prochains temps ?

Mon regard se pose à présent juste à porté de vue, sur les fauteuils autour de moi. La brunette à côté de laquelle je me suis assise semble me regarder avec un air de mépris. Je sais que je dois faire pitié à voir, mais dans ce cas elle ne s'est pas regardé ! Avec son air négligée et sa maigreur presque maladive, elle ne m'a pas l'air moins mal en point que moi !

- Je peux savoir ce que tu regardes comme ça ? lui demande-je sur un air de défit.

Aïe, à peine arrivée, je commence déjà à agresser les gens... mais c'est sa faute aussi, pourquoi est-ce qu'elle a besoin de me jeter cet air sufisant ?

La fille se tourne vers moi et s'adresse à moi sur un ton qui ne me plaît guère. Je lui lance un regard menaçant. Nan mais oh! On respecte même plus les anciens, c'est quoi ce bordel?!

Relax! C'est pas moi qui chiale parce que mes vieux m'envoient dans un centre pour jeunes à problèmes!

C'est sorti tout seul. Je ne suis pas sensée juger qui que ce soit, ni faire de la peine mais là, elle m'a piquée au vif. Elle ne reçoit que ce qu'elle mérite la petite... Faut pas trop pousser non plus!

D'ordinaire, lorsque je m'adresse comme ça aux gens, ils prennent la tangente ou bien baissent au moins le regard. Là, il semblerait que je sois tombée sur une fille aussi difficile que moi... C'est bien la première fois. Cette réaction inédite m'interpelle et me laisse un instant sans voix.
Ok, elle marque un point. Mais, comme toujours, je n'arrive pas à me raisonner avant de prendre la parole et mes nerfs parlent pour moi.

- Je ne chiale pas... et ce n'est pas parce que toi tes parents t'ont envoyés ici sous la contrainte que c'est le cas de tout le monde ici.

Bon, en mon fort intérieur, je sais déjà que cette phrase était une phrase de trop et je regrette de l'avoir dite. Je ne la connais pas plus qu'elle me connais, je n'aurais pas du jetter ces paroles comme ça... Il faut à tout prix que j'essaye de reprendre mon calme...

Têtue la gamine... D'ordinaire, j'aurais apprécié ce trait de caractère mais là, ça me gonflait plus qu'autre chose... J'ai continué de soutenir son regard...

Pour ta gouverne, mes "parents" n'ont rien à voir dans mon arrivée ici. C'est à cause des flics que je suis là. Alors la prochaine fois Cendrillon, ferme-la!

Non mais je rêve ! Et moi qui regrettai de m'être adressée à elle de la sorte ! Maintenant, je regrette d'avoir eu la faiblesse de regretter !! D'abord la miss me toise comme si j'étais une pestiférée, et ensuite elle me cherche... je sens que ce séjour ici va être plus énervant et aussi beaucoup plus long que je ne le pensais.

- Ouuuuh des flics !! Qu'est-ce qu'il y a ? Je suis sensée avoir peur ? Ou bien dois-je juste te trouver pathétique ?!

Et puis zut, la machine est lancée, je ne peux pas l'arrêter maintenant !

Han, nan mais c'est quoi cette gamine, bordel?! Pourquoi je lui ai accordé un regard?! Je me suis levée et l'ai toisée de tout mon haut avec un regard médisant.

1. Tu te calmes tout de suite
2. Si tu continues c'est mon poing que tu vas te recevoir dans la gueule
3. Va vivre dans la rue, ensuite tu pourras parler des flics avec moi!
4. Continue à chialer pour ta famille, ça ne me touche absolument pas!

Ca y est, je me suis lâchée... Putain, qu'est-ce que ça fait du bien!

J'arrive dans le hall, pas le moins du monde gêné par toutes les présences qui sont déja là. Je suis nouveau et alors, c'est pas pour ça que je dois me sentir inférieur ou quoi que ce soit. Je m'allume une clope et me sens déja comme chez moi. Enfin... façon de parler parce qu'en fait cet endroit va m'ennuyer j'en suis certain, les journées vont être "passionantes"! On aura même le droit à des rendez-vous chez le psy! C'est pas génial tout ça?! Puis je suis sure que la bouffe est cuisinée par un grand chef digne de ce nom. Et les dortoirs, je mettrais ma main à couper qu'ils sont somptueux et que le confort sera génial! C'est pas vrai, qu'est-ce que je fous dans cette prison? Si je pouvais me casser vite fait je le ferais. Bon, on va attendre un peu avant de se rebeller... C'est moi qui est dit ça?

La jeune fille s'est levée pour me faire face de tout son corps. Avec du recule, j'aurais sans doute pu la trouver impressionnante, mais lorsque je suis dans un état d'esprit comme celui-ci, je ne vois plus rien, je ne contrôle plus rien, l'agressivité est le seul langage que mon corps comprenne.

Je me suis moi même redressée pour lui faire face, prête à me jeter à son visage, mais au même moment, deux intervenants du centre se sont interposés entre nous.

- Mesdemoiselles, un peu de calme je vous en prie ! dit le plus grand des deux. Non mais qu'est-ce que ça veut dire, on n'est pas sur un ring ici ! Vous allez toutes les deux nous suivre dans le bureau du directeur !

Super... première journée, première heure ici, et me voilà déjà convoquée chez le directeur...

Elle s'est levée à son tour. Je ne savais pas si elle comptait se battre ou m'envoyer une bonne réplique cinglante. Et je ne le saurais jamais parce que deux surveillants sont venus s'interposer. Le directeur? Merde! Il manquait plus que ça...

Fais chier les mecs... C'est bon, je l'ai même pas touchée!

Mais les surveillants semblaient n'avoir rien à foutre de mon témoignage et ont décidé de nos escortés jusqu'au bureau de directeur... Génial, toute seule avec mes deux grands amis, le directeur et une petite pleurnicharde. Cette année promet, vraiment...

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